Arrivé au pouvoir en septembre 2021 après le renversement d’Alpha Condé, Mamadi Doumbouya avait initialement promis de ne pas briguer la magistrature suprême. Il est pourtant aujourd’hui candidat, se présentant comme l’homme de la stabilité et du développement économique. Durant la campagne, il s’est montré particulièrement discret, limitant ses interventions à un clip et à une allocution préenregistrée, laissant ses ministres défendre son bilan et son projet sur le terrain.
Une opposition affaiblie mais présente
Face au chef de la transition, plusieurs figures tentent d’incarner l’alternative. Parmi elles, Abdoulaye Yéro Baldé, ancien ministre de l’Enseignement supérieur sous Alpha Condé, qui avait quitté le gouvernement pour protester contre le projet de troisième mandat. Autre candidat critique, Faya Millimouno, leader du Bloc libéral, n’a cessé de dénoncer les atteintes aux libertés publiques durant la transition, notamment les arrestations d’opposants, les disparitions inexpliquées et la fermeture de médias.
La course comprend également Makalé Camara, ancienne ministre des Affaires étrangères entre 2015 et 2017, seule femme candidate, ainsi que Mohamed Nabé, Bouna Keita, Abdoulaye Kourouma, Mohamed Chérif Tounkara et Ibrahima Abé Sylla.
Les grands absents du scrutin
Cette présidentielle se distingue aussi par l’absence de figures majeures de la vie politique guinéenne, telles qu’Alpha Condé, Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, tous en exil. Leurs partis ont appelé au boycott du scrutin, invitant leurs militants à rester chez eux, ce qui soulève des interrogations sur la participation et la légitimité du processus électoral.
Une élection sous surveillance étroite
Le scrutin est placé sous l’observation de nombreuses missions internationales, notamment celles de l’Union africaine, de la Cédéao et de l’Union européenne, ainsi que d’organisations nationales de la société civile. Le Réseau ouest-africain pour l’édification de la paix (Wanep) a déployé des observateurs à travers le pays, tout en alertant sur les risques de tensions liés aux appels au boycott.
« Certains peuvent interpréter le boycott comme une invitation à empêcher les autres de voter, ce qui peut conduire à des violences », prévient Tamba Jean Tolno, responsable du Wanep en Guinée, tout en se disant rassuré par le dispositif sécuritaire mis en place.
L’Association des blogueurs de Guinée (Ablogui) suit également le processus, avec une attention particulière portée aux restrictions numériques. Après le blocage de Facebook depuis le 22 décembre, son président Baro Condé redoute un durcissement des coupures d’Internet, susceptible de compliquer le travail d’observation électorale.
Un contexte politique toujours sensible
Cette élection se déroule dans un climat politique tendu, marqué par la suspension de partis politiques, la fermeture de médias, l’interdiction de manifestations en 2022 et des accusations de répression visant opposants et acteurs de la société civile. Malgré ces tensions, les autorités affirment vouloir garantir un scrutin apaisé et transparent.
Candidat indépendant sous la bannière « Bâtir ensemble », Mamadi Doumbouya promet « paix et stabilité » et ambitionne d’obtenir une victoire dès le premier tour, selon ses soutiens. Une issue qui, si elle se confirme, ouvrirait une nouvelle page de l’histoire politique guinéenne, mais continuerait de susciter débats et controverses.

