
Cette analyse tente de comprendre les causes profondes, les zones à risques, les acteurs concernés et les perspectives possibles pour enrayer ce phénomène.
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Les zones rouges : cartographie de la peur
Des témoignages de victimes, des rapports de la police locale et des discussions dans les quartiers permettent de dégager des points chauds de la criminalité à Thiès :
Médina Fall : connu pour ses ruelles sombres, ce quartier est devenu un lieu où motos Jakarta et piétons sont régulièrement agressés à la tombée de la nuit.
Cité Lamy – Grand-Thiès : de nombreux cas de vol à main armée ont été signalés à la sortie des lieux de culte ou des boutiques.
Avenue Caen – rond-point hôpital : malgré la forte présence de circulation, les agresseurs opèrent souvent en bande sur des motos.
Les agressions ont souvent lieu entre 19h et 23h, moments où les gens rentrent chez eux, parfois chargés ou distraits.
Causes profondes : entre précarité et démission sociale
• Chômage et oisiveté juvénile
Beaucoup de jeunes sans emploi stable se tournent vers la petite délinquance, voire la violence. Le manque de perspectives nourrit un climat de frustration qui dégénère parfois en actes criminels.
• Drogue et alcool
Certains quartiers souffrent de la prolifération de drogues bon marché comme le "yamba", la colle à sniffer, ou même des boissons frelatées. Ces produits décuplent l’agressivité chez les jeunes.
• Manque d’éclairage public et de caméras
Une grande partie des rues de Thiès est mal éclairée. La ville ne dispose pas encore d’un système efficace de vidéosurveillance.
• Inefficacité de la prévention policière
Même si la police effectue des descentes régulières, elle reste souvent débordée et intervient tardivement. La peur de représailles dissuade aussi les citoyens de porter plainte ou témoigner.
Témoignages glaçants de la rue
Matar, conducteur de Jakarta :
> « J’ai été attaqué vers 22h à Médina Fall. Ils m’ont fait tomber, volé mon téléphone et mon argent. Si les jeunes du quartier n’étaient pas sortis, j’aurais pu y rester. »
Fatou, étudiante :
> « On m’a arraché mon sac près de la route de l’hôpital. Depuis, je ne rentre plus seule. La peur est constante. »
Réaction des autorités : entre discours et lenteur d’action
Les autorités municipales reconnaissent l’urgence. Plusieurs opérations « ville propre et sûre » ont été lancées avec la gendarmerie et la police. Des patrouilles de nuit ont été renforcées dans certains quartiers. Mais les résultats tardent à se faire sentir. Le maire de Thiès, les associations de quartiers et les imams multiplient les appels à la vigilance, mais cela reste insuffisant sans politique globale.
Pistes de solutions durables
Renforcement de l’éclairage public
Un programme de réhabilitation de l’éclairage urbain est urgent.
Implantation de postes de police de proximité
Surtout dans les zones rouges, afin de rassurer les habitants.
Insertion socio-économique des jeunes
Créer des centres de formation, encourager l'entreprenariat jeune.
Encouragement des comités de vigilance citoyens
Sans tomber dans la justice populaire, des systèmes d’alerte de voisinage (WhatsApp, cloches, lampes) ont déjà montré leur efficacité.
Lutte contre les stupéfiants
Des campagnes de sensibilisation ciblées dans les écoles et les daaras.
La montée des agressions dans les rues de Thiès n’est pas un simple fait divers isolé, mais le reflet d’un malaise social profond, d’un manque de prévention, et d’un déficit de sécurité publique. Il est temps que les pouvoirs publics, les citoyens et la société civile travaillent de concert pour redonner à Thiès sa réputation de ville paisible et hospitalière.