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TVA sur les services numériques : le Sénégal pourrait perdre plus qu’il ne gagne


Rédigé le Samedi 10 Mai 2025 à 02:53 | Lu 388 fois Rédigé par


Dès le 1er juin 2025, Google appliquera une TVA de 18 % sur ses services au Sénégal, conformément aux nouvelles exigences fiscales du pays. Si cette mesure vise les géants du numérique, elle risque de fragiliser les petits annonceurs locaux, déjà à la peine, et de ralentir l’élan d’une économie numérique encore émergente. Une réforme légitime, mais à double tranchant.


Dakar, mai 2025À partir du 1er juin 2025, Google appliquera une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 18 % sur l’ensemble de ses services numériques proposés aux clients au Sénégal. Cette décision, en conformité avec les obligations fiscales locales, pourrait sembler bénéfique à première vue pour l'État sénégalais. Pourtant, en y regardant de plus près, cette mesure fiscale risque d’avoir un impact économique bien plus nuancé — voire négatif.

Une manne fiscale... mais à double tranchant

L’initiative du gouvernement sénégalais s’inscrit dans une tendance mondiale : récupérer une part des revenus générés par les géants du numérique opérant localement. Cela semble légitime. Toutefois, dans un écosystème numérique encore fragile et en développement comme celui du Sénégal, cette taxe pourrait freiner la dynamique actuelle.

Google, à travers Google Ads, est un outil clé pour les petites entreprises, les startups technologiques et les créateurs de contenu qui cherchent à se faire connaître. L’ajout de 18 % sur les dépenses publicitaires risque de rendre ces services inaccessibles à une large part d’utilisateurs locaux, déjà limités par de faibles budgets marketing.

Des utilisateurs sous pression

Ce sont les annonceurs sénégalais qui vont directement ressentir le poids de cette taxe. Et contrairement aux grandes multinationales, ils ne peuvent pas répercuter cette charge supplémentaire sur leurs clients sans risquer une chute de compétitivité.

Dans un marché encore en phase de croissance, chaque barrière financière agit comme un frein à l’innovation. Le danger ici est que certains acteurs, notamment les jeunes entrepreneurs du numérique, choisissent d’abandonner les plateformes publicitaires ou de se tourner vers des moyens moins formels et moins efficaces de communication — voire de se désengager complètement du numérique.

Un signal défavorable pour l'économie numérique locale

En voulant encadrer fiscalement les géants du web, l’État risque donc de créer un effet de bord : pénaliser ses propres citoyens. La publicité numérique est un levier de développement, de visibilité et d’accès au marché international. Si son coût devient prohibitif, c’est tout l’écosystème numérique sénégalais qui s'en retrouve fragilisé.

Certes, les recettes fiscales générées par cette taxe sont appelées à croître. Mais cette croissance se fera-t-elle au détriment d’un secteur porteur ? En économie numérique, les effets d’une barrière fiscale peuvent être moins visibles mais plus profonds : désengagement des acteurs, ralentissement de l’innovation locale, fuite vers des alternatives non déclarées, et baisse de la compétitivité régionale.

Une mesure qui appelle à plus de nuance

Le Sénégal a raison de vouloir moderniser son système fiscal, mais il lui faudra aussi adapter ses politiques à la réalité économique locale. Une taxation numérique progressive, ou un système d’exonérations pour les petites structures, aurait peut-être permis d’atteindre un meilleur équilibre entre justice fiscale et soutien à l’innovation.

En définitive, si rien n’est fait pour amortir l’impact de cette taxe, le Sénégal pourrait découvrir que dans la bataille pour taxer les géants du numérique, ce sont ses propres acteurs qui risquent de perdre le plus.

Seyelatyr, Administrateur Thiesinfo
Expert Youtube