
Une jeunesse brisée
Astou a grandi à Khombole. Très jeune, elle tombe enceinte d’un apprenti chauffeur qui l’abandonne aussitôt. Rejetée par sa famille, elle s’installe à Thiès, où la misère et la solitude la poussent vers la prostitution.
« J’avais 18 ans et plus rien à perdre, confie-t-elle. La rue est devenue ma maison, les bars mon refuge. »
Les nuits de la honte
Durant des années, elle arpente les trottoirs de Keur Issa et les hôtels miteux de la route de Dakar. Les clients se succèdent, parfois violents, souvent indifférents. « Je n’étais plus une personne, juste un corps qu’on consomme », dit-elle avec amertume.
C’est dans cette obscurité qu’un événement étrange bouleverse sa vie.
L’apparition et le “don”
Un soir, après avoir été battue par un client, Astou rêve de sa grand-mère disparue.
« Elle me disait : Astou, tu n’es pas née pour ça. Tu as un don, écoute les voix et les signes. »
Peu après, elle commence à ressentir des intuitions fulgurantes : maladies, malheurs, secrets… Elle perçoit ce que les autres ne voient pas. Ses compagnes de la rue deviennent ses premières consultantes.
De la rue au respect
Peu à peu, sa réputation dépasse le cercle des prostituées. Des commerçants viennent discrètement, puis des familles, des couples, et même des marabouts. Aujourd’hui, Astou a quitté la prostitution. Elle reçoit dans une petite chambre de consultation à Thiès, entourée de bougies et de cahiers de prières.
« Je ne suis pas marabout, je ne suis pas sorcière. Je transmets seulement ce que je ressens. »
La blessure qui ne disparaît pas
Malgré ce nouveau départ, elle reste hantée par son passé.
« Je revois les visages des hommes qui m’ont utilisée. Peut-être que mon don est né de cette souffrance. J’ai traversé l’enfer, et c’est ce qui m’a ouvert les yeux sur un autre monde. »
Astou conclut toujours ses confidences par un avertissement :
« Je dis aux jeunes filles : n’attendez pas de toucher le fond pour comprendre votre valeur. Moi, j’ai dû passer par l’humiliation pour trouver ma voie. »